Biomarqueurs Covid-19 : point d'étape et perspectives après un an d'étude
Recherche, Santé
le 6 avril 2021
L'étude pilote sur les biomarqueurs du Covid-19, lancée en avril 2020, grâce au mécénat, a permis d'améliorer la prise en charge des patients au fur et à mesure des mois et d'initier des recherches prometteuses et innovantes. Les équipes
impliquées dans le projet, au CHU Grenoble Alpes et au laboratoire TIMC ont présenté, le 12 mars 2021, en visioconférence, l'état d’avancement de leurs travaux.
Depuis le 7 mars 2020 plus de 3000 patients ont été hospitalisés pour Covid au CHU Grenoble Alpes. L’équipe de spécialistes impliquée dans le projet BioMarCoviD, Pr Epaulard, Dr Le Gouellec et Pr Toussaint en collaboration avec d’autres chercheurs, cherche à identifier des biomarqueurs biologiques pronostic de l’aggravation des patients infectés par le virus SARS-Cov2. En effet, les formes graves de la Covid-19 sont généralement d’apparition retardées, 7-9 jours après les 1er signes cliniques ; c’est en effet à ce moment-là que surviennent des tableaux de détresse respiratoire aiguë de l’adulte (SDRA). Ces tableaux font tout le pronostic de l’infection. Ils conduisent les patients en réanimation, et sont responsables de presque tous les décès. De façon tout à fait originale, ces SDRA surviennent en association avec un "orage cytokinique" sévère, c'est à dire un emballement du système immunitaire, cause principale de ces aggravations tardives et de la mortalité.
« Les biomarqueurs sont classiquement des caractéristiques biologiques que l’on peut mesurer (dans le sang,..) et qui nous informent sur un processus normal ou pathologique. »
Nous avons décortiqué les voies métaboliques impactées par le virus en lien avec l’apparition du SDRA et valorisés nos travaux dans la revue Frontiers in Immunology (Mery et al. 2020) (Figure 1).
À l’hôpital, étant donné l’embolie des différents services spécialisés dans la prise en charge des patients Covid (Unité spécialisés et services de réanimation), il est important de pouvoir disposer de biomarqueurs biologiques en plus de l’expérience clinique permettant de stratifier les patients nécessitant une surveillance accrue et une prise en charge appropriée (corticostéroides, anti coagulants) dès leur admission à l’hôpital (Fig2A). Ces biomarqueurs devront être sensibles et spécifiques pour pouvoir d’une part détecter les patients à risque de s’aggraver et ne pas maintenir en hospitalisation ceux qui n’en auraient pas besoin.
Nous avons étudié des biomarqueurs classiques de l’inflammation, utilisés en routine au CHUGA, comme la protéine C-reactive (CRP) et l’interleukine 6 (IL6). Lorsqu’ils sont mesurés tôt à l’hôpital ces 2 biomarqueurs présentent une sensibilité respective de 73% et 80% et une spécificité de 60 et 62% pour discriminer des patients développant une forme modéré de ceux développant une forme grave de la Covid-19. Ceci signifie qu’ au-delà du seuil de 55,5 mg/l pour la CRP, 73% des patients qui vont faire une forme grave sont bien classés en forme grave. Mais dans 40% des cas, ils seront faussement classés en catégorie sévère. C’est pour cela que nous continuons nos recherches avec d’autres biomarqueurs métaboliques en lien avec l’aggravation. Nous utilisons la métabolomique et la protéomique, pour identifier des biomarqueurs qui une fois combinés aux biomarqueurs de routine dont nous disposons, nous aiderons à mieux identifier les patients à risque de faire un SDRA qui nécessitent une prise en charge appropriée.
Nous avons commencé l’étude de métabolomique sur la plateforme GEMELI-GExiM, structure hospitalo-universitaire créée récemment au CHUGA soutenu par la région AURA et de l’IDEX, qui nous permettra d’évaluer les liens entre dysmétabolisme, inflammation et aggravation de la Covid-19 (Figure 4). Voici quelques résultats de notre étude pilote qui nous conforte dans notre capacité à trouver de nouveaux biomarqueurs supplémentaires prédictifs des formes sévères de la Covid-19 nécessitant une prise en charge lourde et pour lesquelles nous avons besoin de trouver de nouvelles solutions thérapeutiques.
« Les biomarqueurs sont classiquement des caractéristiques biologiques que l’on peut mesurer (dans le sang,..) et qui nous informent sur un processus normal ou pathologique. »
Nous avons décortiqué les voies métaboliques impactées par le virus en lien avec l’apparition du SDRA et valorisés nos travaux dans la revue Frontiers in Immunology (Mery et al. 2020) (Figure 1).
Figure 1 : Impact du virus SARS-CoV2 sur les voies métaboliques favorisant le syndrome de détresse respiratoire aiguë. En inactivant l'enzyme de conversion de l'angiotensine 2, le SARS-CoV2 conduit à une accumulation d'angiotensine 2 et à une diminution de l’angiotensine 1-7, entraînant respectivement une plus grande promotion et une plus faible inhibition des signaux pro-inflammatoires. ACE2 : enzyme de conversion de l'angiotensine 2 ; SDRA : syndrome de détresse respiratoire aiguë ; SARS-CoV2 : acronyme anglais de severe acute respiratory syndrome coronavirus 2.
À l’hôpital, étant donné l’embolie des différents services spécialisés dans la prise en charge des patients Covid (Unité spécialisés et services de réanimation), il est important de pouvoir disposer de biomarqueurs biologiques en plus de l’expérience clinique permettant de stratifier les patients nécessitant une surveillance accrue et une prise en charge appropriée (corticostéroides, anti coagulants) dès leur admission à l’hôpital (Fig2A). Ces biomarqueurs devront être sensibles et spécifiques pour pouvoir d’une part détecter les patients à risque de s’aggraver et ne pas maintenir en hospitalisation ceux qui n’en auraient pas besoin.
Figure 2 : Patients COVID-19 hospitalisés au printemps 2020 au CHUGA (n=265). A. Représentation du parcours de soins de chaque patient . B. Dates des premiers symptômes et date d’hospitalisation des patients hospitalisés au CHUGA entre le 5-03 et le 7-05-2020 (Vague #1) C. Pourcentage de patients dans chaque catégorie de l'OMS (cat 3-6 en fonction du besoin en oxygène ou de l'admission en soins intensifs) et durée du séjour hospitalier par âge et par catégorie de gravité. En rouge, les cas modérés classe 3 (pas d’oxygéno-thérapie), en marron classe 4 (O2<2L/min), en vert classe 5 (O2>2L/min) et en bleu les cas sévères admis en services de soins critiques. D. Age et indice de masse corporelle (IMC) (Poids/Taille en cm2) des patients hospitalisés (en bleu les hommes et en rouge les femmes). 77% des patients admis en réanimation sont des hommes. 64 % des patients sont en surpoids c’est à dire ont un IMC >25.
Nous avons étudié des biomarqueurs classiques de l’inflammation, utilisés en routine au CHUGA, comme la protéine C-reactive (CRP) et l’interleukine 6 (IL6). Lorsqu’ils sont mesurés tôt à l’hôpital ces 2 biomarqueurs présentent une sensibilité respective de 73% et 80% et une spécificité de 60 et 62% pour discriminer des patients développant une forme modéré de ceux développant une forme grave de la Covid-19. Ceci signifie qu’ au-delà du seuil de 55,5 mg/l pour la CRP, 73% des patients qui vont faire une forme grave sont bien classés en forme grave. Mais dans 40% des cas, ils seront faussement classés en catégorie sévère. C’est pour cela que nous continuons nos recherches avec d’autres biomarqueurs métaboliques en lien avec l’aggravation. Nous utilisons la métabolomique et la protéomique, pour identifier des biomarqueurs qui une fois combinés aux biomarqueurs de routine dont nous disposons, nous aiderons à mieux identifier les patients à risque de faire un SDRA qui nécessitent une prise en charge appropriée.
Figure 3 : A. Dosage de l’IL6 et de la C-reactive protéine des patients hospitalisés au CHUGA entre le 5-03 et le 7-05-2020 en fonction du délai entre le dosage et la date des premiers symptômes. B. Performances analytiques de biomarqueurs de l’inflammation dosés dans les 2 jours d’hospitalisation pour distinguer des formes modérés de formes graves de la COVID. Au-delà du seuil de 55,5 mg/l pour la CRP, 73% des patients qui vont faire une forme grave sont bien classés en forme grave. Mais dans 40% des cas, ils seront faussement classés en catégorie sévère.
Nous avons commencé l’étude de métabolomique sur la plateforme GEMELI-GExiM, structure hospitalo-universitaire créée récemment au CHUGA soutenu par la région AURA et de l’IDEX, qui nous permettra d’évaluer les liens entre dysmétabolisme, inflammation et aggravation de la Covid-19 (Figure 4). Voici quelques résultats de notre étude pilote qui nous conforte dans notre capacité à trouver de nouveaux biomarqueurs supplémentaires prédictifs des formes sévères de la Covid-19 nécessitant une prise en charge lourde et pour lesquelles nous avons besoin de trouver de nouvelles solutions thérapeutiques.
Figure 4 : Etude métabolomique en cours pour 123 patients hospitalisés. Les analyses statistiques préliminaires font apparaître la capacité d’une signature métabolique à classer correctement les patients selon la sévérité ultérieure de la maladie (à droite sur la figure).
Publié le 6 avril 2021
Mis à jour le 8 avril 2021
Mis à jour le 8 avril 2021
L’équipe médicale et scientifique
Dr Audrey Le Gouellec et Pr Bertrand Toussaint : Université Grenoble Alpes, Faculté de médecine, Département Biochimie, Laboratoire TIMC (CNRS, UGA – Grenoble INP-UGA)
Pr Olivier Epaulard : Infectiologue CHUGA
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